“Le président de la République : habit noir, pas de décorations, pas d’aides de camp, pas de chevaux, pas de panache. Vit simple, modeste, fier ; entre pauvre et sort pauvre. N’accorde aux princes que ce qu’il en reçoit. Dit Monsieur au roi d’Angleterre et à l’empereur d’Autriche.
En France, l’égal de tous les citoyens ; hors de France, l’égal de tous les souverains.”
Choses vues, Victor Hugo.
(Il n’y a pas de majuscule aux titres mais il y en a au régime et aux nations. Le diable républicain se cache dans les détails typographiques.)
1848, toujours. Au moment où Hugo écrit ces lignes, il est encore de droite. Républicain certes, mais conservateur. Après la révolution de février, il refuse la proposition de Lamartine et de son gouvernement provisoire. Il se prononce pour la Régence. Ce n’est qu’après la chute du gouvernement provisoire qu’il se rend compte que les conservateurs ne veulent pas de la même République que lui. Et qu’il basculera définitivement à gauche. Jusqu’à, à la fin de sa vie politique, se rapprocher et défendre les rouges, longtemps honnis.
Citoyen… Ce mot n’hésite pas, ici, à abaisser un président au niveau de son peuple pour élever ce peuple au rang de souverain. Il était la marque de l’égalité de tous et donc de l’élévation de chacun. Au noble déchu, au prélat, au paysan, on disait citoyen. Aujourd’hui, est citoyen celui qui fait ce que tous ne font pas forcément. Ce mot est devenu celui de la distinction bourgeoise de gauche.
“C’est un geste citoyen !” On affirme ainsi sa différence lucide, sa supériorité morale, sa profondeur de vue, son refus de la facilité parce qu’on a su trouvé seul, au mépris parfois de 50m à pied supplémentaires, le container jaune. Citoyen… C’est ainsi que se nomme celui qui a honte d’être un bourgeois.