On ne peut décemment pas faire allusion à l’actualité sans faire référence à la vague de froid passée. L’hiver est la saison des marroniers chauds et nous ne couperons pas à la tradition éditoriale… Ce froid, alternativement qualifié de polaire ou de sibérien, a été digne du film apocalyptique Le Jour d’après. Les personnages s’y réfugiaient dans une bibliothèque new-yorkaise pour se protéger d’une vague de froid mortelle (et d’un tsunami monstre) en lançant dans un feu de cheminée des livres réduits au statut de combustible, résumant malgré eux le projet hollywoodien. Ce sont les mêmes raisons de survie qui amènent des SDF à la BPi, la bibliothèque du centre Beaubourg. Mais les températures ne sont pas seules en cause. La politique de libre accès chère à la BPi permet aux SDF de se chauffer à l’intérieur, mais également de lire ou de regarder la télévision.
Amazon.com, inc. l’entreprise de commerce en ligne de livres, produits culturels et équipements numériques – également propriétaire de AbeBooks, librairie en ligne d’ouvrages anciens – après son record de ventes du mois de décembre 2011, lance son lecteur numérique Kindle au Japon. Parallèlement, alors quelle est accusée de faire fermer les leurs aux libraires et qu’elle les met au chômage, Amazon.com a pour projet d’ouvrir des boutiques aux Etat-Unis pour ses produits et embauche en France.
Il y a des privilèges que le livre conservera face à l’e-book, comme son odeur si particulière et nous ne sommes pas près de voir quelqu’un se penchant les yeux fermés et le sourire aux lèvres sur son Kindle pour le renifler à plein nez. Mais pourquoi les vieux livres sentent-ils bons ?
Quoique… Ils sentent si bon et la chose est pour certains lecteurs si importante, si nécessaire qu’on imagine volontiers le réflexe conditionné que peu provoquer une numérisation réussie, d’un exemplaire particulièrement rare et beau. La BnF a numérisé l’un de nos trésors nationaux, rien que ça. Allez mettre la Marseillaise à plein volume, et debout la main sur le coeur, appréciez – page 7, 47 ou 63 – la qualité des enluminures de la Vie de sainte Catherine d’Alexandrie de Jean Mielot… Ne sentez vous pas l’odeur du vélin ?
Sera-t-on victime de la même illusion face aux oeuvres de la zone grise ? Le Sénat a donné son accord à une proposition de loi permettant la numérisation des livres épuisés mais n’appartenant pas au domaine public tout en prévoyant la perception des droits des auteurs et des éditeurs.
Epilogue : en utilisant les extraits des oeuvres originales, Brian Joseph Davis crée, sur suggestion des lecteurs, les portraits-robots de personnages de la littérature mondiale. Il utilise pour cela les logiciels d’identification de la police. En attendant le portrait de Dorian Gray, vous pouvez voir ceux d’Humbert Humbert, de Sam Spade ou d’Emma Bovary. On espère retrouver ainsi l’assassin de la rue Morgue…