Archives pour Mercredi 22 Septembre 2010 à 19:20

Eureka Street, des copains ouvrent une librairie à Caen

Mercredi 22 Septembre 2010 à 19:20 - Catégorie: Uncategorized
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Le libraire est un animal qui a beau être omnivore et vivipare, il n’en est pas moins en voie de disparition.  Sa proximité morphologique avec l’espèce humaine devrait pourtant en faire une des espèces phare des programmes du WWF, mais, hélas ! celui-ci n’en a cure.

Mis en concurrence avec les Amazon farouches et les vendeurs de chaussettes qui n’hésitent pas à vendre des livres, la population libraire s’étiole. Sa faible capacité de reproduction ne l’aide pas beaucoup, et on a vu des couples de libraires élever des banquiers : la nature est ainsi faite qu’elle étonne toujours…

C’est pourquoi l’ouverture d’une librairie est un évènement qui est aussi émouvant que de nager avec les baleines sans avoir pris de kétamine (quoique nager avec des baleines sous kéta doit être vachement chouette aussi). Car, comme chacun sait, quand il n’est pas à l’apéro, le libraire vit dans une librairie. La librairie est au libraire ce que l’aire est à l’aigle, la tanière au loup, l’intestin au ténia, un endroit qui sent bizarre mais dans lequel il se sent bien, qui lui est indispensable pour poursuivre sa saine activité de libraire.

Or, tenez-vous bien, une libraire ouvre à Caen, 19 place de la République. A l’heure où la République se porte si mal, voilà une nouvelle qui fait chaud au coeur. Elle s’appelle Eureka Street et elle est tenue par Bénédicte et Pierre. Mais ce n’est pas tout, Eureka street est aussi une librairie itinérante en forme de Camion-Livre que vous trouverez sur les marchés de Caen et lors de certains évènements populaires et culturels. Ce Camion-Livre est conduit par Pierre qui est vachement plus fort que Bénédicte au bras de fer et ceci afin de respecter une vieille coutume des conducteurs de poids-lourds. Ils vendent du neuf et de l’occasion et à vue de nez se sont orientés vers la littérature, le polar, la SF et la jeunesse. Et on peut y boire du thé ou du café.

Avant qu’on ne découvre sa dépouille dans La Salle des espèces menacées et des espèces disparues du Museum d’Histoire Naturelle, allez-donc voir à Eureka Street, dans son milieu naturel, un des derniers couple de libraires en liberté (ils se sont même rencontrés dans une librairie, c’est dire). Vous y observerez Pierre, le mâle, conseiller des polars qu’il a réellement lu, alors qu’il y a un résumé sur la quatrième de couverture ; vous y verrez également Bénédicte parler de littérature comme si c’était un sujet vraiment important : ils sont comme ça les libraires… Un peu bizarre mais tellement proche de nous… Parfois, on croirait des êtres humains…

Plus d’infos, si tu cliques.

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« Notre escalier n’est point du tout propre à l’exécution d’un projet amoureux ; je fus obligée de me contenter de mille baisers et autres petits riens, le reste nous étant a peu près impossible par la situation des lieux. En quoi mon amant eût pu cependant réussir s’il eût voulu sacrifier son aisance à mes désirs, mais c’était un garçon qui, quoique jeune, recherchait déjà ses petites commodités en amour. J’eus pour lui plus de complaisance ; je lui rendis un de ces services obligeants qui, quoique dénué de plusieurs circonstances de la réalité, se termine par les mêmes effets. Cet aimable enfant, touché de mes bontés, versa par reconnaissance de ces larmes qui se répandent avec plaisir. »

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4 Belles dans le barillet : Yseut

Lundi 06 Septembre 2010 à 10:24 - Catégorie: 6 Belles dans le barillet
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Yseut ne tient à rien. Ou tout du moins à pas grand chose. Ou plutôt, si l’on tient à Yseut, c’est pour des raisons tout à fait dérisoires. Un regard. Une odeur. Une vision et un parfum.

La vision. Deux yeux en amandes. À les voir, on se doute que le fruit par lequel on nomme la forme de ses yeux a été inventé après, pour qu’hommage soit rendu à ces deux gouffres dans lesquels les hommes se jettent éperdument et s’abîment au mépris d’eux-mêmes.

Le parfum. C’est celui  d’une fleur ayant sué pendant une longue étreinte estivale. Une première fragrance, légère, insinuante, imprègne le nez le plus obtus. C’est un safran, un pistil qui s’immisce. Puis une seconde, plus capiteuse, tout à fait sexuelle, captivante, celle d’une liane fleurie de corolles suppurantes de plaisir, pénètre violemment la cavité nasale avant de percer un chemin jusqu’au cerveau, pour s’y loger entre les deux lobes frontaux, à l’endroit exact où l’on éxécute les vaincus d’une belle en pleine tête.

Yseut n’est qu’une vision qui apparaît lors des solitudes nocturnes pour y laisser à travers de longues érections douloureuses les draps trempés de sueur et de tremblements. Yseut n’est qu’une odeur qui devient une idée fixe, que l’on croit deviner partout pour ne la sentir nulle part. Elle est la femme faite obsession, le mouvement perpétuel des nuits désenchantées, le désespoir fait cause. Nul ne saurait dire de quelle façon exactement elle serait jolie ou belle. Tous dirait qu’elle a du charme, que son regard est une hypnose et que son parfum est un filtre d’amour médiéval. Et que sans qu’elle ne soit ni charmeuse, ni charmante, on la croise et l’on est charmé, envouté, ensorcelé, supplicié, pieds et poings liés par le désir, possédé par l’idée de la posséder. Yseut est inoubliable. C’est la femme fatale malgré elle.

Yseut traverse la vie en allant de mort en mort, d’homicides en suicides, de faits d’hivers aux massacres estivaux durant lesquels ses prétendus prétendants s’égorgent ou se pendent avec une abnégation sectaire. Yseut est l’objet d’un culte extrême,  justifiant les plus absurdes dévouements, les sacrifices les plus graves et elle ne compte plus autour d’elle les tragédies sanglantes qui de l’automutilation adolescente à l’autolyse des patres familias souillent son existence de fautes qu’elle n’a pas commises. Car elle n’a pas voulu séduire la plupart de ses victimes. Et, en admettant même qu’elle le veuille bien, elle ne pourrait se donner à toutes. Yseut a des prétendants dans tous les cimetières. Et c’est souvent aux enterrements qu’elle engeôle à nouveau.

Les uns ont, au hasard d’un regard ou par la coïncidence d’un coup de vent, connu un enfer immédiat. Les autres, ceux qu’elle a voulu séduire, ont eu la chance de goûter au fruit défendu avant de connaître la chute. Ils ont d’abord été captifs d’une spirale de désirs temporairement satisfaits. Yseut aime faire l’amour autant qu’elle le peut, de toutes les façons qu’elle le peut. Puis, post coitus, ces mêmes désirs renaissent encore plus violents et plus inassouvis. Ceux qu’elle a effectivement voulu séduire ont sombré dans une longue descente au paradis au gré de scénarii sexuels dont elle a été l’héroïne pure. Puis, arrivés au moment où ils ne pouvaient plus être à la hauteur de leurs propres fantasmes, ils ont été rompus, c’est à dire qu’elle les a quittés, les laissant, au propre comme au figuré, impuissants, émasculés en plein priapisme béat. De cette poignée d’élus, il ne reste que des insomniaques, des alcooliques, des fous ou, bien pire, des hommes dont le reste de vie est un regret immense.

Nul ne quitte Yseut. Jamais. Cela fait partie de son charme.

Yseut est tout à fait innocente des drames qu’elle provoque. Objet d’une cour permanente et universelle, elle n’a de toute façon qu’une idée très imparfaite des sentiments qu’elle suscite pour n’avoir jamais connu elle-même la solitude et les obsessions que cette dernière  sublime et va, bien à raison, d’homme en homme sans jamais connaître le célibat. Assurée d’une victoire permanente, elle a rêvé, les rares nuits qu’elle a du passer seule, à ce soldat, bizarrement mutilé, auquel une belle perdue sur un champ de bataille aura arraché d’un coup la vue et l’odorat ; qui jamais avant que l’âge ne s’en mêle, ne sera impuissant ; qui du simple fait de sa présence, interrompra à jamais la ronde morbide des désireux… des morts… et des remorts…

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